mercredi 27 janvier 2021
Le Conseil d’État passe à côté du problème
Le Conseil d’État vient de rendre son avis sur le projet de loi constitutionnelle, et il est révélateur par ce qu’il dit, et aussi par ce qu’il omet. Le texte, on le rappelle, vise à modifier l’article premier de la Constitution en indiquant que «[La France] garantit la préservation de la biodiversité et de l’environnement et lutte contre le dérèglement climatique». La haute juridiction est sévère sur la biodiversité, elle rappelle en effet que «le principe de protection de l’environnement occupe déjà la plus haute place dans la hiérarchie des normes.» En gros ça ne sert à rien. Pire, l’État se met en danger : «En prévoyant que la France "garantit" la préservation de la biodiversité et de l’environnement, le projet imposerait aux pouvoirs publics une quasi-obligation de résultat dont les conséquences sur leur action et leur responsabilité risquent d’être […] lourdes et imprévisibles.» Par contre, l’avis ne dit rien concernant le «dérèglement climatique», hormis une remarque de forme (substituer au verbe «lutter» le verbe «agir») ! Pourtant, les contraintes que s’imposeraient l’État dans ce domaine seraient bien plus «lourdes et imprévisibles» que dans celui de la biodiversité. Plus grave, le fait de s’interroger sur la réalité du réchauffement climatique anthropique n’effleure même pas les conseillers… L’instance chargée de conseiller l’État passe complètement à côté du problème, comme s’il était tabou, ce qui pose, une fois de plus, la question de sa légitimité et de son utilité.